Récits de mer : collectages personnels
C'est au sein de ma propre famille que j'ai eu le privilège de collecter mes premiers récits en tant que conteur. Depuis les histoires de débarquements près de Conleau à la "Pointe des Emigrés" lors de la Révolution que mon défunt oncle Michel aimait à me raconter lorsque j'étais enfant, jusqu'aux histoires fascinantes de naufrages dans le lointain Canada, ou les anecdotes tragi-comiques autour de la "Pêche à Islande", et autres récits de passeurs de la région de Paimpol entendus dans ma belle-famille, mon sac à contes est rempli de récits originaux qui ne demandent à tomber dans vos oreilles.
Le pays de Paimpol, mon pays d'adoption depuis une quinzaine d'année, est à jamais marqué par la "Grande Pêche". Depuis la "Croix des Veuves", les anciennes venaient guetter, dit-on, le retour de leur mari. Et s'habillaient de noir pour le restant de leurs jours si le navire d'un membre de leur famille manquait au retour : car tous les hommes d'une famille embarquaient sur la même goëlette, de sorte qu'un seul naufrage suffisait à plonger un bourg entier dans un deuil perpétuel. Cependant toutes les veuves n'étaient pas également éplorées, surtout si le Bon Dieu s'était avisé d'écouter leurs prières pour être débarrassées d'un mauvais mari. Le rire alors se mêle aux larmes, comme le soleil à la pluie....
Et la peur aussi est de la partie, lorsqu'un équipage paraît une nuit de Toussaint, et que l'on apprend plus tard, qu'en réalité toute la bordée avait disparu en mer. Leur navire avait sombré dans la dernière tempête, et nul n'en avait réchappé, mais la nouvelle n'était pas encore parvenue au pays...
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